Commençons par les bonnes nouvelles. Nokia, en dixième position, témoigne de l'avance dont l'Europe bénéficie en matière de technologies mobiles, l'une des industries les plus stratégiques de notre époque. Le fabricant finlandais représente à lui seul 40 % du marché mondial des téléphones sans fil et est à la pointe de la transition vers l'Internet mobile. La société canadienne Research in Motion, qui produit le Blackberry, est en 13e position, alors que les entreprises américaines comme Motorola, qui connaît de nombreuses difficultés, sont les grandes absentes de ce classement.
L'industrie automobile est l'un des autres atouts majeurs de l'Europe. Les fabricants de véhicules haut de gamme tels BMW, Daimler et Audi (membre du groupe Volkswagen) figurent tous au classement - signe indubitable de la domination qu'exerce l'Allemagne sur ce segment. Il convient cependant d'ajouter que le Japonais Toyota, troisième de la liste, devance tous les autres fabricants automobiles du monde.
Ce secteur ne bénéficie pas seulement de la présence des géants de l'industrie, mais aussi d'un réseau de fournisseurs innovants, comme l'Allemand Continental, et de marques plus confidentielles, comme Ferrari. Selon Michael Davies, maître de conférences à la Sloan School of Management du MIT et consultant auprès de nombreuses sociétés européennes, "tout ce secteur unit ses efforts pour innover".
Des entreprises qui résistent
En réalité, les données montrent que l'innovation est en grande partie assurée par de petites et moyennes entreprises, qui ne sont généralement pas prises en compte par les enquêtes. Une étude réalisée par des chercheurs de l'école de commerce Insead, qui envisage l'innovation pays par pays plutôt qu'entreprise par entreprise, révèle que les pays européens se portent bien. Certes, les États-Unis sont loin devant, mais l'Allemagne se classe deuxième, et cinq des dix premières places sont occupées par des pays du Vieux Continent. Soumitra Dutta, auteur de ce travail, attribue en partie cette progression à la déréglementation imposée par l'Union européenne, qui constitue selon elle un facteur déclenchant.
Ainsi, les concepteurs de machines-outils d'outre-Rhin, des PME pour la plupart, ont prospéré en fournissant aux fabricants du monde entier, dont la Chine, l'Inde et la Russie, les machines dont ils ont besoin. C'est une des raisons de la bonne tenue de l'économie allemande dans un contexte mondial pour le moins agité. Siemens, l'une des rares multinationales du secteur, figure en 38e position. Selon Nani Beccalli-Falco, directeur général de GE International, "l'Allemagne est le berceau de la technologie, et nous souhaitions tirer profit de cette caractéristique".
Le protectionnisme, frein à l'innovation
Cependant, l'Europe doit encore faire des efforts pour devenir aussi innovante que sa rivale d'outre-Atlantique. Le capital-risque est encore bien plus rare qu'aux États-Unis. Seule la Grande-Bretagne peut réellement se vanter de posséder des universités dotées de centres de recherche de classe internationale. Les gouvernements ont encore des réflexes protectionnistes quand les industries nationales sont en cause, ce qui, à long terme, isole les entreprises de la pression concurrentielle et étouffe dans l'oeuf toute pulsion novatrice. C'est ce qu'explique Ann Mettler, directrice exécutive et fondatrice du think tank bruxellois Lisbon Council : "C'est dans les secteurs où la concurrence est la plus forte que l'innovation est la plus présente."
Dans notre dossier spécial sur l'innovation en Europe, nous mettons en avant six entreprises petites et grandes qui sont à l'origine de grandes idées, de modèles d'entreprises originaux ou de technologies révolutionnaires destinées à changer le monde. Depuis la Suisse Asset4, pionnière en matière de collecte, d'analyse et de diffusion de données extrafinancières concernant les entreprises, jusqu'à la start-up hollandaise European Climate Exchange, dont le réseau électronique gère 85 % des échanges de droits d'émission de CO2 européens, toutes sont à la pointe de secteurs émergents.
Même les géants que sont Nokia et Danone doivent réaliser des innovations d'envergure pour rester compétitifs dans des industries où la concurrence est impitoyable. Nous vous invitons à consulter notre dossier spécial, qui comprend des diaporamas consacrés aux centres d'innovation européens les plus actifs.
source: http://www.lepoint.fr/business-week-economie/ou-en-est-l-innovation-en-europe/1022/0/248111