bénéficier de taux de croissance à deux chiffres et tout de même être
inquiet ? Oui. Chez Intel, où l'on sait que « seuls les paranoïaques
survivent », l'excellence des derniers résultats trimestriels
n'empêche pas ce champion des microprocesseurs de trembler pour son
avenir.
En 1996, Andy Grove, alors PDG de ce géant américain avait fait de la
paranoïa une forme suprême de management. « Le succès porte les germes
de son propre échec », écrivait-il en expliquant que les entreprises
se retrouvent parfois confrontées à des « points d'inflexion ». Ces
moments où une vague de fond bouleverse tout l'équilibre sur lequel
elles ont bâti leur fortune.
Intel est aujourd'hui face à l'un de ces moments où l'histoire risque
de basculer. Porté par l'informatisation de la planète, Intel est avec
Microsoft le grand gagnant de l'ère du PC. Plus de huit ordinateurs
sur dix dans le monde tournent au « Intel inside ». Mais l'avenir
n'appartient plus au micro-ordinateur, qui se cantonnera
progressivement à un, certes, gigantesque, mais néanmoins simple
marché de renouvellement. Dans la « tech », l'innovation est désormais
tirée par les terminaux mobiles et par Internet. L'intelligence
électronique n'est plus sur le bureau. Elle est dans nos poches ou sur
le réseau. Pour Intel, qui contrôlait l'ancien monde du PC,
l'émergence de cet univers parallèle est terriblement menaçant. Car,
sur ce segment, ses parts de marché, sa capacité à imposer ses prix, à
rythmer l'innovation et à garder les concurrents à distance sont
faibles. Ce n'est donc pas un hasard si en moins d'un mois Intel a
dépensé plus de 9 milliards dans des opérations de croissance externe
pour tenter de combler son retard. Reste à voir si l'on peut s'acheter
un avenir quand on a du mal à se l'inventer par ses propres moyens.
Source : DAVID BARROUX -
http://www.lesechos.fr/info/analyses/020752677557-la-paranoia-d-intel.htm